Ca y'est, après trois ans d'attente, Lego s'est enfin décidé à sortir un set Technic avec du pneumatique dedans. Voici donc le camion de remorquage lourd et effectivement il envoie du lourd niveau fonctions.
Au premier coup d'œil, il ne fait aucun doute que ce camion se voit uniquement sur les routes américaines. Mais justement pourquoi une telle différence entre les camions américains et européens?
Il faut savoir que la réglementation sur la longueur des camions n'est pas la même en Europe et aux USA. La longueur définie par la réglementation en Europe oblige donc à caser le moteur sous la cabine et avoir donc une face avant plate.
Ensuite, les routes américaines n'ont pas le même niveau d'aménagement et la même taille que les routes européennes. Les routiers partent souvent pour des voyages de plus d'une semaine et il vaut mieux avoir accès facilement au moteur en cas de pépin technique en plein milieu du désert. Avec le design européen, c'est pas très pratique.
Dernier point, qui rejoint un peu le précédent. Mettre le moteur tout devant permet d'abaisser la hauteur du plancher et donc d'offrir un habitacle plus spacieux pour le conducteur. Pour des voyages de longue durée, là aussi c'est plus pratique.
A l'inverse, ces camions sont assez peu adaptés aux routes européennes, beaucoup moins rectilignes que les routes américaines et je ne parle même pas des rues plus étroites en ville où ça doit être un cauchemar de manœuvrer. Bon après cela n'empêche pas Lego de vendre ce set en Europe et pour cela on ne peut que les remercier.
Un des premiers dispositifs à être construit sur ce camion est le double différentiel qui relie les deux derniers essieux au moteur. Pour savoir comment fonctionne un différentiel, je vous propose de lire cet excellent article :
J'avoue, je n'ai pas trouvé d'autres moyens que l'autoréférencèrent pour monter dans la hiérarchie des recherches Google. Pour l'instant engrenaches, c'est majoritairement du pinard...
Pour les doubles différentiels, on ne peut pas faire n'importe quoi, on ne peut pas mettre les couronnes des deux différentiels du même côté des pignons centraux. Vu qu'en fonctionnement, ils tournent tous les deux dans le même sens, les mettre du même côté reviendrait à imposer deux rotations de sens opposés aux pignons centraux donc c'est un grand non!
Je n'en ai pas parlé dans l'article sur la technique des pièces techniques, mais les vis sans fin sont des pièces qui, associées à des pignons droits, sont plutôt cools puisqu'elles ont pas mal d'avantages:
-Elles permettent de transmettre un mouvement entre deux axes à 90°. Là où c'est fort par rapport à des pignons coniques, c'est qu'on peut placer la vis sans fin et son pote le pignon à n'importe quel endroit sur les axes alors que pour les pignons coniques, au moins un des axes s'arrête au niveau des pignons. Donc pour répartir les efforts sur les axes, c'est plus intéressant.
-Une propriété intéressante qui est utilisée ici, c'est l'irréversibilité. Si l'angle de la vis est bien choisie, une rotation de la vis fera tourner le pignon mais le contraire n'est pas possible. Et ceci permet de bloquer la position de l'énorme grue du camion tant qu'on ne touche pas à la vis.
-Enfin, ça permet d'avoir des rapports de réduction assez dingues dans un minimum d'espace puisque le rapport de réduction est égal au nombre de dents du pignon de pour le nombre de dents de la vis. Comme on considère que la vis a une dent, le calcul est très vite fait.
Par contre niveau rendement, c'est assez lamentable puisque le système génère énormément de frottements et donc beaucoup de chaleur.
Pour l'anecdote, j'avais fabriqué un sismographe pour l'épreuve du T.P.E. au bac avec un système de rouleaux pour faire avancer une feuille de papier sous la pointe du sismographe. J'ai donc utilisé un moteur Lego lié directement aux rouleaux mais ça tournait trop vite. J'ai donc ajouté un peu au pif une vis sans fin et j'ai obtenu un truc qui marchait parfaitement alors que je pigeais absolument rien à l'époque sur le système que j'avais mis en place.
Tout cela me fait rappeler que je devrais aller à mon ancien lycée pour récupérer ce sismographe. Après 15 ans, je pense que c'est le bon moment...
On l'a déjà vu, Lego passe souvent par des raccourcis pour copier certaines fonctions sur ses modèles. Mais dans certains cas, c'est plutôt des chemins sinueux que prend l'entreprise pour certaines fonctions.
C'est le cas pour les quatre stabilisateurs qui fonctionnent de concert. Et donc pour faire fonctionner tout ça en même temps, il faut, en vrac, des axes, des vérins, des joints de cardans, des joints homocinétiques et des pignons. Bref autant de composants qui dans la vraie vie font vite augmenter la facture mais aussi le risque de défaillance parce plus il y'a de pièces plus il y'a de causes possibles de défaillance. En vrai, on préférera plutôt quatre actionneurs raccordés électriquement ou un circuit hydraulique. Même en temps que mécanicien, il faut savoir rester raisonnable.
Mais bon, on ne cache pas son plaisir de voir tous ses stabilisateurs fonctionner ensemble en faisant tournant un simple pignon. Enfin il vaut mieux le faire une fois le modèle entièrement construit, parce que comme j'ai la sale manie de vérifier que tout fonctionne pendant le montage, j'ai complètement perdu les positions des vérins données par le manuel d'instructions et j'ai pris un temps fou pour trouver une bonne synchro entre les quatre stabilisateurs. A bon entendeur!
Il est enfin temps de discuter un peu de pneumatique en commençant par le distributeur. Il a été introduit pour la première fois sur le dernier modèle pneumatique sorti en 2018 et du coup, c'est la première fois que je le vois en vrai et il est beaucoup mieux fini que l'espèce de vieux truc carré qui lui sert de prédécesseur.
Avec ses formes, qui ressemblent un peu plus à du Technic, on peut l'intégrer plus facilement dans un modèle et c'est d'ailleurs le cas ici puisqu'une des faces sert d'habillage pour le camion.
Autre point positif, les embouts pour connecter les tuyaux sont situés sous la pièce et non plus sur le côté. Cela permet de concevoir des systèmes pneumatiques dont la largeur vaut l'unité de base en Lego Technic. Avant, à cause de la position des embouts et des rayons de courbure des tuyaux, il fallait minimum trois unités pour ne pas abimer les tuyaux.
Enfin dernier point positif, l'ajout d'un trou pour axe Technic. Comme ça, on peut planquer le distributeur au milieu du modèle et déporter le mécanisme d'activation du distributeur, voir même, soyons fous, utiliser un moteur pour activer le distributeur. Lego n'a pas encore tenté le coup mais les connaissant, ce trou n'est pas là pour faire joli...
Parlons un peu du circuit pneumatique. Ce n'est pas nouveau mais il est constitué de tuyaux de trois couleurs différentes: bleu pour relier la pompe aux embouts centraux des distributeurs, noir pour se fixer sur les embouts noirs des vérins et gris pour se fixer sur les embouts gris...euh pardon jaunes des vérins. Bien évidemment, il n'y aucune différence entre les tuyaux de différentes couleurs, c'est juste pour éviter de se tromper dans les raccordements. Ajouter à cela le nouveau design des distributeurs qui réduisent un peu le nombre de nœuds dans le circuit et au cerveau et vous obtenez un montage assez élégant et bien plus facile à comprendre que le circuit pneumatique du Lego 42043 où j'avais passé près de deux heures à tout mettre en place.
Petit reproche à Lego tout de même, les tuyaux n'ont pas tout à fait la même longueur que dans la notice. Est-ce qu'il faut contacter le service après-vente de Lego pour ça? Je ne pense pas. Il doit déjà être surchargé en raison de blogueurs qui écrivent des articles plus longs sur une faute d'orthographe faite sur une pièce d'un set que la review du set elle-même.
Encore un mécanisme que j'ai oublié de présenter dans la technique des technic: la crémaillère et pourtant c'est le mécanisme qui est utilisé dans la plupart des modèles pour faire tourner les roues et sur les vraies voitures aussi.
Une crémaillère c'est un peu comme un pignon qu'on aurait déroulé et mis à plat
Ce qui est curieux, c'est que le système, tel qui se présente sur le modèle, transforme un mouvement de rotation en un mouvement de translation qui se transforme en deux mouvements de rotation grâce à l'utilisation d'un parallélogramme déformable.
Les experts diront que c'est la direction qui permet le meilleur "retour d'information" et donc le pilotage le plus précis. Mouais... je ne suis pas sûr que c'est pour ça que ce système est présent sur ce modèle.
Ce qui est bien avec des modèles Technic et les faibles efforts en jeu, c'est qu'on peut tenter des trucs auxquels on n'oserait même pas penser pour concevoir une vraie machine: un croisement d'axes. Oui, vous avez bien lu; un croisement d'axes.
En même temps lorsque le moteur est entraîné par les roues arrières, la direction est contrôlée par une molette située sur le toit du camion et que le moteur est situé au-dessus des roues directrices, il faut bien que tout ce petit monde se croise à un moment.
Pour cela, il suffit d'un pignon qui est simplement porté par un axe qui lui aussi peut tourner et prier pour qu'il n'y ait pas d'adhérence entre cet axe et ce pignon. Et c'est ce qui se passe ici, la rotation d'un axe ne vient en aucun perturber la rotation de l'autre. Ce qui est, il faut le reconnaître, bien pratique quand on veut éviter d'actionner le moteur en tournant les roues.
La photo ci-dessous est un peu trompeuse, puisque le connecteur situé dans le prolongement de l'axe jaune n'est pas relié à celui-ci, il s'agit uniquement d'un renfort.
Le mouvement de l'axe jaune descend via les deux pignons les plus à droite dans la direction. Idem pour l'axe gris qui n'est pas lié à ces deux pignons. son mouvement est envoyé dans le moteur par la série de trois pignons dont le rouge monté sur l'axe jaune et que l'on appelle pignon fou. Fou, c'est un peu ce qu'on peut dire du designer de ce mécanisme.
Bon j'avoue, c'est une fonction que l'on construit quasiment au début mais elle prend son intérêt une fois le montage terminé. Grâce à une molette il est possible de relever un des trois essieux arrières parce que suivant l'utilisation du camion, que ce soit pour aller porter secours à un véhicule en difficulté ou le remorquer, le besoin en adhérence n'est pas le même. Sans véhicule à remorquer, six roues en contact avec le sol suffisent et ça permet d'économiser du pneu et du carburant. Par contre, lorsqu'il faut sortir un véhicule de la panade, l'adhérence des huit roues n'est pas de trop car on peu mettre en place tout plein de dispositifs mécaniques pour augmenter l'adhérence mais le seul qui restera toujours en contact avec la route, c'est bien les pneus.
Des roues à cliquets, il y'en a sur plein de modèles Lego et à chaque fois elles sont remarquables de simplicité. Celle-ci ne déroge pas à la règle. Alors effectivement elle utilise une pièce en caoutchouc pour venir plaquer le cliquet contre le pignon mais sinon c'est que de la pièce classique. Et ce qui frappe notamment, c'est l'utilisation du connecteur gris clair et de sa collerette en tant que cliquet qui vient parfaitement se coincer entre deux dents du pignon. On peut donc se demander si la pièce a été conçue pour ça ou si cette utilisation a été découverte plus tard. Perso, je penche pour la deuxième, mais dans les deux cas cela montre la capacité de Lego à faire des pièces bien conçues et multifonctions.
Reconnaissable à sa couleur bleue, le système de remorquage comprend plein de fonctions avec tout d'abord une barre de remorquage qui peut être complètement relevée à la verticale lorsqu'elle n'est pas utilisée parce que c'est toujours mieux de ne pas laisser trainer un truc sur lequel peut s'empaler les autres véhicules.
Une fois cette barre de remorquage descendue et passée sous le véhicule à secourir, l'ensemble peut se soulever pour décoller les roues du véhicule tracté du sol ou du moins ce qu'il en reste. Par contre, je ne sais pas comment aider un véhicule si il n'y a plus aucune roue qui tourne...
Si l'essieu avant est complètement arraché ou le véhicule complètement embourbé, c'est la grue qui rentre en jeu pour sauver les infortunés voyageurs de la route. Avec la rotation de cette grue, ces différentes possibilités d'extension et l'enroulage des câbles de remorquage, il y'a de quoi faire pour tenter de placer le véhicule en détresse sur la barre de remorquage. Par contre, la grue seule ne pourrait pas remorquer parce que imaginez ce qu'il peut se passer si le conducteur a besoin de faire un freinage un peu trop appuyé...il faudrait un camion de dépannage pour camions de dépannage.
Il est grand temps de conclure. Pour le retour du pneumatique, on peut dire que Lego ne s'est pas foutu de nous avec un set avec tout plein de fonctions. D'ailleurs il me rappelle pas mal le mythique 42043, il y'a pire comme comparaison.
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